George, d’Alex Gino (2017)

Avertissement : chronique négative (relativement sérieuse).

George, d'Alex Gino, L'École des Loisirs 2017George est un petit roman racontant l’histoire d’une fillette que tout le monde perçoit comme un garçon. Elle s’appelle « George ». Depuis toujours. Pourtant, c’est une fille ! Comment le faire comprendre à son entourage, dans ce monde où on la pousse sans arrêt dans des rôles de garçon ? George va se mettre en tête de jouer un rôle féminin dans la pièce de théâtre de l’école, et peu à peu, ce choix « interdit » va prendre pour elle de plus en plus d’importance, symbolique et personnelle…

George m’a été recommandé plusieurs fois* comme une petite pépite d’une douceur et d’une ténacité touchantes sur le thème important de l’identité des personnes transgenre, et encore plus important ici car on se place dans le regard d’un enfant transgenre — enfants qui ont peu de modèles auxquels se rapporter.

* Notamment par Nathan (à la minute 11:10). Clique sur l’image pour accéder à la vidéo.

George, j’étais toute prête à l’adorer ou, au moins, à l’aimer pour le rôle de représentation qu’il tient. Or, j’ai plutôt détesté ce bouquin. Et je ne le recommande pas.

Contextualisons : je n’ai pas détesté ce bouquin pour le message central qu’il porte, c’est-à-dire « tu peux être toi-même, et devenir aux yeux des autres ce que tu es à l’intérieur ». Ça, c’était bien. C’était même très bien.

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Mais ça ne sauve pas le roman qui a un gros, gros problème flottant de SEXISME ATRABILAIRE GÉNÉRALISÉ.

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Or, dans un roman pareil, sur l’identité de genre, ce n’est pas anodin. Vraiment pas ! C’est même totalement incohérent, j’en reparle plus bas.

La grande question que je me suis posée, c’est donc :

Doit-on célébrer un roman au message positif fort s’il véhicule aussi une cargaison de problèmes ? Y a-t-il des maladresses acceptables, et où placer la limite (pour ce roman en particulier) ?

LES « PLUS »

  • #1. Le thème abordé, nécessaire.

La question transgenre est méconnue et il est souvent très difficile pour les individus transgenres de se faire comprendre et accepter, surtout lorsqu’ils sont enfants, où leurs questions ont tendance à être évacuées.

comment-ca-marcheUn individu transgenre est quelqu’un que tout le monde perçoit comme appartenant à un genre qui n’est pas le sien (comme George, une fille que tout le monde voit comme un garçon). C’est extrêmement difficile à comprendre même chez les gens ouverts d’esprit, car on a tendance à raisonner autrement. (Nommément, en termes d’organes sexuels.)

Le seul fait que j’aie besoin d’écrire ce paragraphe témoigne de la nécessité d’aborder ce thème dans la culture. La culture (et donc ici la littérature) tient un rôle informatif, voire pédagogique. Je n’aurais pas eu besoin d’expliquer l’homosexualité, par exemple : ça fait un bail que ce sujet de société est traité dans nos livres, films, etc. Ça ne garantit pas l’acceptation, au demeurant, mais ça informe.

 

  • #2. L’approche authentique, par un auteur transgenre.

Le fait qu’Alex Gino soit transgenre permet probablement au roman d’éviter les écueils symptomatiques d’une vision extérieure, par exemple : au lieu du trope habituel « une fille coincée dans un corps de garçon »*, on est du point de vue de George, « une fille que tout le monde perçoit comme étant un garçon » (ce qui, semble-t-il, est bien plus fidèle au ressenti des personnes trans).

* Le sujet avait par exemple été présenté ainsi dans le roman Gracefully Grayson, d’Ami Polonsky (vraiment meilleur d’un point de vue littéraire) -> Le secret de Grayson en VF, chez Albin Michel.
Ci-dessous, une mini-liste de romans évoquant la question transgenre, mais tous sont plutôt destinés à un public ado, quand la vraie originalité de George, c’est de se placer du point de vue d’un enfant de 8 ans (qui sait déjà qu’elle est une fille).

 

  • #3. Le rôle du théâtre

Ici, la pièce de théâtre dans laquelle s’implique George permet un dépassement du problème de genre par un déplacement identitaire pratique et propice au propos du livre. George veut interpréter le personnage de Charlotte l’araignée dans « Charlotte’s Web » (un roman classique d’enfance dans le monde anglophone, traduit sous le titre Le petit monde de Charlotte). Ce combat pour tenir un rôle féminin devient pour George un enjeu personnel immense car la fillette espère ainsi faire comprendre à sa mère qui elle est vraiment

(C’est le même principe dans Le secret de Grayson. Une idée qui n’est pas nouvelle donc, mais du reste, ça fonctionne très bien.)

  • #4. L’optimisme

George est un roman qui donne de l’espoir. Il s’attache à dire aux jeunes lecteurs : Tu peux être toi-même ! D’autres t’accepteront comme tu es. Et tu seras heureux/se.

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Je ne suis pas difficile, un bon petit roman dont on sort en ayant envie de chanter en se dandinant, moi, ça me va très bien. Sauf que c’est plutôt un autre type d’humeur que ce roman a éveillé en moi :

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Donc, LES « MOINS »

  • #1. La pauvreté littéraire (due au fait qu’il s’agit d’un « roman à message »)

C’est assez mal écrit.

Je n’aime pas trop les romans « à thèmes » de manière générale, et celui-ci ne fait pas exception. Pourquoi je n’aime pas ? Parce que ce que j’aime, c’est la littérature. Un roman « à thème » est didactique, démonstratif, et c’est indubitablement le cas de celui-ci. Ça ne m’empêche pas de penser que certains thèmes sont nécessaires, mais, vraiment, je préfère qu’on m’écrire un vrai roman, une œuvre littéraire traversée par ces thèmes, pensée avec eux, plutôt qu’un manuel type « Max & Lili » pour résoudre un problème. Ces romans-manuels ont leur rôle, ils sont bien pratiques, mais bon, là, on est chez L’École des Loisirs, alors flûte, j’ai le droit de le dire : niveau style, c’est le désert du Gobi.

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Pas de petite fulgurance, pas de jolies citations à retenir. La mer est calme sous ma planche de surf. #Ennui.

  • #2. L’incarnation des personnages, pas toujours cohérente.

Kelly, la meilleure amie de George, est le 2e personnage principal. Or, du côté de Kelly, plein de choses sonnent faux, que ce soit dans sa maturité, dans ses revirements, ou dans certaines répliques d’adolescente très éclairée (alors qu’elle a 8-9 ans). Dans le reste du casting, c’est tout aussi marqué voire plus.

  • #3. La triple dose de sexisme archétypal de la mort qui tue

Le roman est branché sur deux réservoirs : un rose à paillettes, un bleu à crottes de nez. Et il pompe, il pompe, nous déversant continuellement en intraveineuse sa vision genrée super-segmentée des rôles masculin et féminin.

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Parce qu’elle est une fille… George (à 8 ans) aime se maquiller, la mode, les magazines ; parce qu’elle est une fille, George déteste les jeux vidéos enfin surtout ceux qui sont violents ; parce qu’elle est une fille, George n’aime pas jouer avec les garçons, George n’aime pas le sport, George est fragile et faible, George trouve que les garçons sont répugnants et agressifs ; parce qu’elle est une fille, George est plus émotive et pleure plus facilement.

#L'Homme

#Le mâle

C’est déjà beaucoup, mais ce n’est pas tout. Les personnages masculins sont eux aussi victimes de cette vision caricaturale débile : ils sont tous vulgaires, crados, bordéliques, distraits, violents… Que les mecs soient positifs ou négatifs, ils correspondent tous à au moins 2 ou 3 de ces qualitatifs (Scott le frère de George, le père de Kelly, les garçons de l’école…) C’est le festival du cliché sexiste.

Alors, ça m’aurait forcément fait tiquer dans n’importe quel roman, mais dans celui-ci, c’est catastrophique. Le fait que les genres ne soient pas en noir et blanc, c’est pas un peu… le thème central ? Le message du roman ?

La représentation des genres, c’est littéralement le sujet du livre. LITTÉRALEMENT.

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Auto-objection #1 :
« Mais quelque part, est-ce que ce n’est pas un peu normal qu’une fillette transgenre se raccroche à des repères de féminité (maquillage, mode, etc.) ? »

  • Oui, c’est probablement normal… Mais est-ce que c’est une raison pour présenter tous les mecs comme des gorets ? Il suffirait d’un personnage non-archétypal dans le roman. Un garçon sensible, une fille sportive…
  • Il me semble que ce roman fait plus de mal que de bien. Est-ce que les filles (transgenre ou non) n’ont pas le droit, potentiellement, de mettre des baskets et d’aimer les jeux vidéos et d’être quand même des filles ? Est-ce que les garçons n’ont pas le droit de pleurer en lisant un livre et d’être quand même des garçons ?
    La petite fille que j’étais, qui adorait le judo, chaussait avec amour ses baskets à scratchs tous les jours, jouait à celui qui court le plus vite, je peux te dire qu’elle te corrigeait si tu la prenais pour un garçon. Parce que ce ne sont pas ces symboles là qui font notre genre. C’est nous, à l’intérieur, et c’est tout. Et c’est cette nuance que le roman rate complètement.

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Auto-objection #2 :
« Certes le roman n’est pas parfait mais il porte un message crucial !
Alors bon, on peut passer sur certaines choses. »

  • Le problème de ce roman, c’est qu’il ne porte pas le message qu’il prétend porter. Pour les raisons déjà évoquées, je suis obligée de l’analyser comme un « roman à message » plutôt que comme une œuvre littéraire — ce qui est sans doute mieux pour lui — or, dans son message-même, il y a une tension interne hyper problématique.
  • On ne peut pas d’un côté soutenir que les apparences sont trompeuses, que les choses ne sont pas en noir et blanc, qu’une personne ressemblant à un garçon peut en réalité être une fille… et de l’autre présenter une vision des genres très segmentée dans laquelle George est une fille parce qu’elle est une petite chose fragile qui aime la mode et les magazines, et n’est pas un garçon parce qu’à l’inverse les garçons, eux, sont des porcs vulgos, bordéliques et violents! C’est antithétique. Le message est raté. Le livre se contredit comme un sale politicien, tenant un discours d’ouverture tout en démontrant continuellement un sexisme ahurissant.

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  • Par ailleurs, ce n’est pas parce qu’un roman porte un beau message que ça oblitère ses autres messages négatifs. Un roman féministe qui serait en même temps raciste, ça ne passerait pas. Un roman « Black power » qui serait homophobe, ça ferait hurler. Alors pourquoi un roman pro-transgenre qui est hyper sexiste, ce serait ok ?
  • Sans doute parce que, « le sexisme, c’est pas graaaaaave ».

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CONCLUSION

Des romans comme George, on en a besoin. C’est sans doute pour ça que les éditeurs (Américain et Français) l’ont choisi, l’ont défendu. C’est une démarche engagée. Les romans sur le transgenre sont rares, et pour les 8-12 ans, quasi inexistants.

Des romans comme George, on en a besoin. Mais celui-là, il n’est pas bon. Et je ne peux pas le recommander sous prétexte que « c’est le seul » : justement parce que c’est un thème sensible et important, il mérite d’être bien traité. Je suis contente que George existe parce qu’il ouvre des portes. Il incitera je l’espère d’autres écrivains à traiter avec plus de panache la question transgenre en littérature jeunesse. Dans un roman porté par une narration forte et des personnages bien incarnés. Et sans greffer dessus la vieille mue reptilienne d’un sexisme suranné. Please.

Des romans comme George, on en a besoin. Mais celui-là, il n’est pas bon. Au plaisir d’en lire de meilleurs,

Lupiot

Lupiot Allez Vous Faire Lire

George, d’Alex Gino, collection « Neuf » de L’École des Loisirs, 2017, 176 pages (écrit gros)


Remarque subsidiaire : « BE WHO YOU ARE », nous dit la quatrième de couverture. Pourquoi le dit-elle en anglais ? C’est un roman dirigé vers les 9-12 ans, en français. « Sois qui tu es » ou « Sois toi-même » ou même une traduction moins littérale comme « Tu es qui tu es », ne serait-elle pas plus pertinente ? (Sachant combien les kids de 9 à 12 ans parlent bien anglais…)

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39 réflexions sur “George, d’Alex Gino (2017)

    • En ado on commence à en avoir pas mal et quelques-uns de vraiment bons (comme Le secret de Grayson) ou qui proposent des approches avec des tons différents (« Fille ou garçon » est assez drôle !). De vrais bons romans.
      Mais des livres sur la question y en a peu pour les petits — ce qui est normal dans le sens où, habituellement, on traite ça sous l’angle de la sexualité et des premières tensions et premiers émois amoureux >> adolescence — sauf que, si ton attirance amoureuse/sexuelle sera plutôt une question pertinente à l’adolescence (hétéro, gay, lesbien, bi, asexuel… ? etc.), la question de ton *genre* est différente, et est un ressenti qui se présente beaucoup plus tôt : à 8 ans, on sait déjà, on sent, si l’on est une fille ou un garçon. Même si l’on peut jouer avec plein de codes, ils ne sont que ça, justement, des codes : notre genre, on le connaît. Du coup, un roman comme George, je trouve ça TRÈS intéressant qu’il existe !

      Et oui, TRÈS dommage qu’il soit bête. Comme tu dis, next.
      (Mais je suis assez enthousiaste car je pense que sa seule existence peut susciter de nouveaux romans dans ce style.)

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  1. Haha la transition par le gif de Mowgli m’a bien fait rire! D’ailleurs toutes tes illustrations sont super pertinentes et super drôles =D J’ai noté le secret de Grayson, merci pour les conseils! C’est vrai que ce roman fait très didactique, d’ailleurs je ne sais plus si je te l’ai dit mais c’est vrai que je n’ai pas vraiment accroché aux 100 premières pages du roman. Je vais rajouter un renvoi à ta chronique dans la mienne parce que je trouve tous tes points très justes et que je le pense aussi, même si bizarrement ce roman ne m’a pas fait rager comme toi ^^

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    • La raison pour laquelle ma lecture a été si désagréable c’est que j’ai tout de suite tiqué (genre, page 3) sur un truc sexiste et qu’après j’étais au taquet, œil de lynx impitoyable (et que c’était de pire en pire). Comme quand tu regardes un film avec une copine et que l’une de vous fait une remarque sur le ridicule de tel élément X, et du coup après tu ne vois plus que ça et tu es morte de rire de A à Z. Ça a joué xD

      Mais pour rédiger cette chronique, j’avais laissé retomber mon énervement et je suis partie à la recherche de jolies citations & vérifier si le sexisme était aussi abhérrant que dans mes souvenirs : purée c’est catastrophique « -.- Du coup, la rage passée, reste un énervement plutôt légitime et une sorte de « déception trahie », parce que ce roman, j’aurais VRAIMENT PRÉFÉRÉ qu’il soit *bien* !

      J’ai vu ton lien, merci !!

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  2. Oula alors ouais, le cliché de  » la fille met du rose, des robes et se maquille ( bordel à 8-9 ans tu te maquilles pas en plus daaaaaaaaah ) « , et le garçon est  » un bon gros dégueu qui se la joue thug des bacs à sable, osef de l’éducation j’suis un rebelle « , ça casse toute l’envergure du roman ! Heureusement que tu as fais cette chronique, puisque les autres chroniqueurs ne traitent pas cet aspect là alors que comme tu le dis ça dénote totalement ! Après, je peux essayer de me dire que voilà, pour des enfants, l’archétype peut servir de repère est le thème n’est pas facile facile à intégrer à cet âge ( déjà que pour des adultes ça peut être difficile.. –‘ ) et que du coup il faut une certaine base à laquelle se raccrocher mais… Ouais, le garçon qui joue à la poupée, ou la fille qui s’éclate avec son circuit de voiture, s’ils lisent ça je pense qu’ils vont être frustrés en se disant  » Ah bah, je suis pas normal ? Je (le garçon) suis censé faire mumuse avec les voitures, et elle doit s’éclater à faire la princesse ?  » Bref, je pense que je devrais me construire mon avis en le lisant, mais sans en attendre quoi que ce soit. En tout cas pour la question de l’archétype féminin/masculin, la bd Bichon de David Gilson est fort sympatoche.

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    • Oui, n’hésite pas à le lire, surtout que tu as un point de vue adulte et *en plus* tu as déjà lu des avis positifs et négatifs dessus, donc tu entres dedans avec beaucoup de recul. C’est plutôt l’idée de le faire lire à des petits gnomes qui me fait grincer des dents, parce que la représentations des genres…. voilà, quoi. Alors qu’EN MÊME TEMPS, je trouve le thème fort et très intéressant. (Donc c’est très agaçant.)

      Merci pour la reco BD !

      Edit : je suis tout à fait d’accord : un enfant perçu comme un autre genre que ce qu’il est (« fille dans un corps de garçon » ou l’inverse) aura forcément besoin de se raccrocher à des repères. J’aurais dû développer un peu plus cette idée après l’avoir soulevée, car je pense qu’elle est importante (et elle ressort énormément dans les témoignages de JEUNES trans (préados)). Mais ça n’empêche pas la représentation des genres d’être une cata, et c’était si simple de résoudre le pb : que George soit un « cliché de fille », ok, il suffisait alors de mettre pleins des personnages nuancés autour ! Des hommes plutôt élégants, des filles de sa classe un peu brutales, des petits garçons sensibles, des femmes un peu vulgaires… Brrrref.

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      • Je comprends tout à fait ton ressenti, c’est vrai que c’est une grosse maladresse qu’à fait l’auteur mais bon…
        Et pas de quoi pour la reco’ BD ! C’est avec plaisir !

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  4. Rien à voir directement avec George, mais je trouve tes questions sur la segmentation féminin/masculin très pertinentes. Je me les suis aussi posée après avoir lu bon nombre des planches d' »assignée garçon » (« Assignée garçon BD » sur facebook). J’ai été et je suis toujours un « garçon manqué » (quelle horrible expression! – mais tellement clair dans la tête des gens), pour autant je n’ai jamais mis en doute mon genre, ou plutôt je m’en contre-carre comment les gens me perçoivent. Je pense vraiment que le genre ne s’arrête pas à l’extérieur, que c’est quelque chose de beaucoup plus profond, personnel et intérieur, comme tu le dis. Un livre qui ne parvient pas à éviter cette segmentation me semble effectivement dangereux car il pourrait facilement provoquer un sexisme aggravé, surtout dans le public visé, qui ne serait d’ailleurs pas bénéfique ni aux cis- ni aux transgenres.

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    • Mais oui !!! (Et moi aussi j’étais un « garçon manqué » – expression que j’adorais, petite, et que je trouve horrifiante avec mon œil d’adulte – ce qui nous rend peut-être plus sensibles à ces thèmes, mais je n’en suis même pas sûre : les « vrais mecs » ont pas plus envie d’être vus comme des gorets ignares et violents que les fillettes comme pouffes superficielles et fragiles, je crois.)

      Et oui c’est ce qui me gêne avec l’idée de faire lire ce roman à des petits. Il n’est pas pire que d’autres question sexisme, mais comme c’est *justement* son thème et sa thèse centrale, purée, ça a plus de poids…

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  5. Bon. Après ce billet, non, je ne le lirai pas. Les arguments m’ont l’air tout à fait pertinents ! Le bon côté de la chose, c’est que je ne pense pas avoir lu des livres sur ce « thème » et que du coup, j’ai noté qu’il y en avait d’autres !

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  6. Next hein !
    Ceci dit j’aime beaucoup ton billet, car justement tu soulèves toutes les problématiques auxquelles on se frotte dès qu’on aborde le sujet du genre : d’un côté on va au-delà des clichés pour parler de quelque chose qui n’est pas admis mais en même temps, qu’est ce qui fait le genre ?
    J’ai eu un cours complet sur les représentations du genre et du féminisme à la fac l’an dernier et j’avais adoré : et justement, on montrait que si à la fois, être une fille ne veut pas dire avoir les cheveux longs et mettre du vernis à ongles, c’est pourtant l’une des premières choses qu’un homme qui devient femme va faire pour se faire considérer comme tel(le). Tout de suite, ça complique les choses…
    Il faut vraiment que je lise le bouquin d’Eugenides à ce sujet, il paraît qu’il est génial ! (je crois que c’est Middlesex)

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  7. Suite après fausse manip: Je l’ai commandé pour la médiathèque après avoir vu tous ces bons avis et parce que je trouve important d’avoir des romans pour les jeunes traitants de ce sujet.. du coup j’attends de le lire pour voir ce que j’en pense moi même mais si effectivement on y retrouve une forme de sexisme je ne suis pas sûre que ça fasse avancer la cause. J’espère quand même en tirer quelque chose.

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  8. Okay, je passe mon tour… Dommage, il aurait pu sérieusement m’intéresser, mais si c’est pour lire des clichés comme on en voit déjà tous les jours, ce n’est pas la peine. Donc je vais plutôt noter les autres titres que tu donnes. Merci pour le temps que je n’ai pas perdu grâce à toi !

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  9. Je n’ai pas grand chose à ajouter : j’avais tiqué sur le côté rose et magazines de fille, mais je n’avais pas poussé suffisamment la critique, en me disant qu’on en avait besoin.
    Mais effectivement non, pas comme ça. Je ne sais pas, j’ai du me dire que je n’y connaissais tellement rien dans le sujet que je ne pouvais rien dire… Mais super chronique, avis détaillé.
    Je vais pouvoir me pencher sur ta liste. C’est vraiment dommage que George ait manqué sa cible, parce qu’il aurait été parfait dans ma classe, près des 6e. (Je l’ai passé à ma bonne lectrice pour ne discuter avec elle, je lui ai dit que la représentation des genres me gênaient, elle m’a dit qu’elle allait voir ça, mais qu’effectivement, ça n’avait pas l’air bien) (oui elle est en 6e et elle est merveilleuse) (mini-moi).

    Bref, merci pour ton éclairage 🙂

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  10. Hello 🙂
    Bon , j’ai lu les commentaires aussi, et pour reprendre: next.
    Effectivement, après plusieurs chroniques très enthousiastes, je lorgnais avec envie sur ce roman.
    Du coup, là, non. Merci d’aborder ces points, car je me pose les mêmes questions quand je lis/vois des romans/posts/etc pro-transgenre, qui montrent que les filles jouent à la poupée, et que les garçons préfèrent se bagarrer, jouer au mécano ou au détective.
    Quand j’étais petite (8-9 ans), ça me faisait grincer des dents quand je voyais que les legos et les playmobils autres que « je joue à la maîtresse » étaient dans les pages « pour garçons », et en plus en bleu. J’adorais mes poupées, mais mon deuxième jeu préféré était les playmobils, et j’avais aussi des jeus « mécanos ». Et je suis et ai toujours été une fille.

    Donc encore merci ^^

    PS: Je ne sais pas si tu le savais, mais « cette fille, c’était mon frère » est une réédition de « la face cachée de luna » ^^

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    • Je ne savais pas que Cette fille c’était mon frère était une réédition xD Du coup vous êtes nombreux à me le signaler mais c’est pas grave ^^
      Moi petite j’étais carrément un « garçon manqué », je faisais une réaction allergique à tout ce qui était emballé-pour-les-filles : en rose, à paillettes, en violet, en verni… tsss. Et ce alors que je pouvais aimer jouer à la poupée ou aux polypocket (comme aux Playmobiles ou aux voitures télécommandées), c’est juste que si tu me les mettais dans un paquet rose j’allais pas les approcher à 10m (ma boîte de polypocket était bleue xD). Peut-être que je sentais le côté « glucose-fifille-gentil » dans lequel on essaie d’enfermer et faire grandir les petites filles, et que j’étais décidément plus attirée par le côté « aventureux-inventeur-ose-tout » dans lequel on emballait les jouets et vêtements pour mecs ?
      COMME C’EST BIZARRE.
      Note : c’était vraiment une question d’emballage en plus ‘-.-
      Et pour revenir au sujet, ben, dans George, c’est ça qui fait mal au cœur… le fait que l’on sente les gamins prisonniers non pas de la société (avec des pressions extérieures, le côté « emballage », ce qui aurait été intéressant) mais de l’auteur, car ils sont PAR NATURE sportifs-brutaux-crades-distraits (côté garçon) et douces-émotives-élégantes-attentives (côté fille). Cette négation de l’individualité me rend marteau.

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  11. Pingback: Sunday’s Book n°5 : 27 février – 12 mars |

    • Je réponds 1000 ans plus tard car j’avais raté ton message : je suis entièrement d’accord… L’écueil du simplisme et du cliché est *peut-etre* justement dû au choix du public jeune… (mais si c’est le cas c’est un mauvais calcul : c’est pas parce qu’on est moins mûr qu’on est plus bête).

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  12. Bah mince alors, moi qui voulais le lire, me voilà drôlement déçue… Mais bien avertie!
    Pour en revenir à la liste, Cette fille, c’était mon frère, qui est en effet une réédition de La face cachée de Luna, m’a fait le même effet dès les premières pages, à tel point que je n’ai pas voulu le continuer. Je trouvais ça mauvais et agaçant exactement pour ces raisons et ça m’a tellement bloqué que j’ai préféré ne pas poursuivre ma lecture. En espérant que les autres que tu proposes réussiront à m’emporter =3

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    • xD Comme je dis dans le commentaire en-dessous, pas mal de romans sur ce thèmes me semblent assez… maladroits… mais, indépendamment du thème traité, ils peuvent être de bons romans ! (Imparfaits, du coup, mais avec d’autres qualités : une belle plume, de l’humour, des personnages marquants ; que sais-je…)
      Pour George c’était très léger de ce côté-là aussi malheureusement « —

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      • Il y a Celle dont j’ai toujours rêvé de Meredith Russo qui est sorti il n’y a pas très longtemps sur le thème. Je ne l’ai pas encore sous la main, mais du coup je me demandais si tu comptais le lire. C’est plus ado que jeunesse du coup, mais qui sait, peut-être qu’un duo auteur/illustrateur nous feront un bel album sur le sujet un jour?

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  13. Pingback: Le secret de Grayson, d’Ami Polonsky (2014) | L'ourse bibliophile

  14. C’est la première critique négative que je lis sur ce roman. Je ne l’ai pas encore lu (je suis censée le recevoir depuis l’avant dernière MC Babelio – ça fait plus d’un mois), mais je comprends ton point de vue. Et du coup je ne comprends pas pourquoi Alex Gino a écrit un livre aussi genré – même si, oui, un enfant a besoin de repères ; le rose et les paillettes, la fragilité et la sensibilité pour définir une fille, c’était loin d’être la meilleure chose à faire…
    Bon, j’ai quand même hâte de le lire pour voir ce que ça donne, mais je suis tout de même un peu plus réticente.

    Je n’avais pas aimé « Fille ou garçon » ; le roman semblait aller vers la question des transidentités pour finalement conclure sur une bonne blague de travestissement. Ma soeur avait aimé, alors c’était peut-être aussi une question d’âge.

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    • Pour l’instant je n’ai pas encore trouvé de roman qui me séduise complètement sur cette question, du coup j’ai l’impression que l’identité de genre ne peut qu’être malmenée (et c’est peut-être tout simplement parce que je sujet est flou, complexe, casse-binette). En revanche, sur ce thème (et alors-même que le thème lui-même n’était pas parfaitement traité, donc), j’ai lu de meilleurs romans que George (notamment Fille ou Garçon qui, indépendamment de cette question, était un bon roman !) Tu vois ce que je veux dire ?
      Je suis curieuse de lire ton avis (même bref, hein) sur George, quand tu l’auras lu !

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  15. Pingback: Des livres et des représentations, les clichés sont-ils partout ? – Dans ta page !

  16. Je retrouve là exactement les soucis que j’ai quand j’échange avec une personne transgenre.

    Si je trouve effectivement sain et positif d’évoquer la tolérance et le droit à chacun d’être qui il veut, je ne comprends pas cette obsession des personnes transgenres à ne se définir qu’en vertu de celui-ci.

    Dépasser les clichés sexistes, c’est précisément exister en tant que soi, et pas « en tant qu’homme » ou « en tant que femme ». D’ailleurs si on y réfléchit bien, que signifie « en tant qu’homme » ou « que femme » ? Est-on censé avoir des goûts différents, des centres d’intérêt différents ? On est exactement là dans la dimension sexiste qu’a priori toutes les personnes transgenres ont intérêt à voir combattre.

    D’ailleurs, en médecine, lorsqu’une personne souhaite officiellement changer de sexe, cette personne a un suivi psychologique où l’on observe si elle *se comporte bien comme une personne du sexe opposé* avant de valider ledit changement ! Un détail que je trouve proprement ahurissant au passage…

    Bref, pour moi ces clichés sexistes sont en fait inhérents aux revendications transgenres (du moins comme elle le sont par la plupart des militants concernés). Et c’est bien dommage…

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  17. Arf.
    Je viens de tomber dessus à la bibliothèque et, vu que je n’en avais entendu que du bien (et que, comme tu le fais si bien remarquer, il n’y a pas franchement foule en matière de concurrence si on veut lire sur ce thème) je l’ai pris en me disant « Chouette, j’ai de la chance. »
    Et puis, en l’encodant sur Babelio, je tombe sur ta critique…

    Bon, je vais éviter d’en faire le procès avant de l’avoir lu mais j’entre dedans avec un peu moins d’entrain, du coup. Au mois, si je fini par partager ton opinion la déception en sera moins grande.

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  19. Bon, j’ai voulu lui donner sa chance mais j’ai vite laissé tomber : je n’ai pas eu le temps d’être horrifiée par le sexisme ambiant, trop dépitée par le style, VRAIMENT mauvais… (Okay, peut être que je n’aurais pas du enchaîner sur ce livre après un Pennac ou un Marie-Aude Murail, pas facile de passer après eux…).

    Du coup, je suis revenue lire cet article car je me souvenais bien que tu n’avais pas été conquise. Je ne peux que te donner raison. Tant pis, il y en a d’autres, next !

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