Quand on trouve que c’est bien écrit, mais mal fait

J’avais prévu de publier une chronique sur Quelqu’un qu’on aime, de Séverine Vidal (quelqu’un que j’aime plutôt), paru chez Sarbacane (un maison d’édition que j’aime aussi) cette année 2015. Mais j’étais tarabistouillée car, ce roman… il m’a déplu. Il m’a déplu alors qu’il reçoit les louanges de plein de lecteurs intéressants et intelligents. Alors forcément, me voilà tarabistouillée. (Vous me direz « les goûts et les couleurs » : oui, évidemment. Mais…) Je trouvais qu’il y avait des problèmes techniques, dans ce road-movie plein d’amour. Du coup, j’ai laissé mijoté ce roman sur ma table de chevet en attendant de savoir qu’en faire.

quelqu'un qu'on aime séverine vidal sarbacane

Un roman qu’on n’a pas tellement aimé : chroniquer, ne pas chroniquer ? Je trouve généralement plus enrichissant de partager ses bonnes découvertes. Par ailleurs, Quelqu’un qu’on aime est loin d’être assez mauvais pour que j’estime nécessaire de venir lui boxer le menton en faisant entendre ma voix dissidente*. Alors : ne pas chroniquer ?

D’un autre côté, la polémique récente entourant le billet nauséabond de Christophe Honoré dans Le Monde des Livres (Honoré qui, pour la petite histoire**, s’était fait les dents sur Alice Brière-Haquet, auteur jeunesse qui ne méritait pas ça) m’a amenée à me demander si on n’était pas un peu de frileux petits poneys, au pays merveilleux de la critique littéraire jeunesse. Et s’il n’était pas sain de dire qu’on trouve ça bof quand c’est bof. En effet, il n’y a pas que la littérature-poubelle d’un côté, et la littérature-merveille, de l’autre. Il y a des entre-deux qui peuvent mériter d’être égratignés. Alors : chroniquer ?

Vous allez le remarquer assez vite...

Vous allez le remarquer assez vite…

Spécialisée dans l’art d’avoir les fesses entre deux chaises, j’ai trouvé la solution en lisant un autre roman qui m’a lui aussi semblé bien écrit, mais mal fichu : Les mauvaises notes, de Claire Julliard. Armée de ces deux exemples, je m’en viens donc rédiger un théma : « Oui, ça arrive qu’un bon livre soit mauvais »

...j'ai décidé de faire une thématique...

…j’ai décidé d’agrémenter cet article…

Pourquoi ? Parce que (comme Karim Debbache de Crossed qui, pour l’instant et par défaut s’est, quant à lui, spécialisé dans la critique de mauvais films sur les jeux vidéos), je crois qu’il y a beaucoup à retirer de quelque chose qui ne fonctionne pas. C’est en mettant le doigt dessus que l’on peut mieux comprendre, admirer et s’approprier les mécanismes du récit. Et là, on est content.

...Avec mes gifs préférés de Karim Debbache.

…de gifs magiques de Karim Debbache.

La lecture de Quelqu’un qu’on aime (résumé en bas de page**) m’a beaucoup ennuyée, alors que j’y voyais un fort potentiel. Très vite, plusieurs problèmes se sont manifestés :

  1. quelqu'un qu'on aime séverine vidal sarbacaneUne grande distance, dans la narration, comme si on regardait une récap’ « dans les épisodes précédents »… continuellement. L’usage trop répété du plus-que-parfait est à blâmer, à mon avis. (Le PQP, c’est ça : « Il avait fait ceci, puis il avait fait cela, et voilà que maintenant, il se retrouvait à… parce qu’il était sorti de la voiture, puis avait enfilé ses chaussures, puis il s’était tourné vers X et lui avait dit : blabla, et X avait ri, mais maintenant, voilà que… » Bref, le plus-que-parfait, dans une narration au passé, c’est le temps du résumé-des-derniers-événements.)
  2. Pas d’évolution des personnages au-delà des 40 premières pages où, lors de leur présentation, ils SONT super intéressants et, tous, dans une situation potentiellement conflictuelle. Mais aussitôt, exit le conflit grâce au road-trip et, paradoxalement, plus rien ne bouge. Or, pour voir de quoi ils sont faits, il faut placer des épreuves sur le chemin de ses personnages.
  3. Des personnages dénués de défauts. (Quand ils en ont, c’est malgré eux, comme l’un qui a Alzheimer et une autre, des tocs.) De sorte que leurs interactions semblent toujours positives et bienveillantes. Or, s’il n’y a pas de conflit à l’extérieur (les épreuves que j’évoquais plus haut), et pas non plus de petites laideurs intérieures… c’est assez fade. Et moi ça me rend triste.crossed karim debbache triste

Ces éléments donnent naissance au problème final (enfin, selon moi) : une ambiance de drama familial américain « ma famille dysfonctionnelle mais parfaite », où tout le monde s’aime sur fond de beaux paysages, de bébés mignons et de dictons complaisants.

C'est mon dernier, promis.

C’est mon dernier, promis.

Le roman partait très bien : les personnages sont caractérisés de façon intéressante, et le concept Little Miss Sunshine aurait dû fonctionner. Et, surtout, Séverine Vidal, elle sait écrire, nom didiou, alors c’est quoi ce schmilblick ? # La preuve par 3 que ça peut être bien écrit (ça l’est), mais mal géré.

Les Mauvaises notes (résumé en bas de page****) présente quant à lui un problème beaucoup plus facile à déceler. Pleins phares sur :

  1. les mauvaises notes claire julliard école des loisirsl’anachronisme linguistique. L’auteur nous raconte une histoire censée se dérouler dans les années 90 (assez facile à situer grâce à la crise de la vache folle) dans une langue des années 60-70. Une belle langue de cette époque, hein, ce n’est pas le souci. Expressions, tournures, vocabulaire et autres maniérismes sont datés, et surtout, en incohérence avec l’univers croqué. C’est d’autant plus troublant dans les dialogues : les enfants, qui ont 12 ans, non seulement parlent comme des livres, mais encore, comme des livres des années 60-70. Je crois deviner que l’auteur ramène le langage de l’enfance à sa propre enfance qui doit se situer dans ces décennies, ou peut-être est-ce dû complètement à autre chose ; quoi qu’il en soit, cet écart de réalisme nous tire (plus ou moins brutalement, selon le passage) de la lecture. La langue est déconnectée de l’histoire.

C’est un « problème » qui, bien souvent, n’en est qu’un demi, et dont on s’accommode plutôt bien (selon ses habitudes et ses affinités). chroniques martiennes ray bradbury folio sfPar exemple, lorsqu’on lit de la science-fiction des années 50, on accepte assez rapidement les tournures désuètes et même les mentalités étonnamment vieillies dans un univers futuriste (ou rétro-futuriste). Mais là, dans un roman des années 90 destinés à un public d’enfants des années 90 (et même des années 2010, car il a été réédité cette année), c’est maladroit.

Je ne vous déconseille pas ces deux livres, j’ai même vraiment apprécié Les mauvaises notes, malgré ce défaut prégnant. Quelqu’un qu’on aime m’a ennuyée mais continue de toucher de nombreux lecteurs, et a de sincères qualités littéraires. Ces deux titres auront été le prétexte à l’évocation du tourment critique en littérature jeunesse (je vous invite à lire ma note de bas de page**) qui consiste à se demander…

  1. …si, alors que le rayon a déjà du mal à se faire sa légitimité, l’on peut dire du mal des gens bien ? (Ce que les blogs littéraires évitent de faire)
  2. …si un roman peut être écrit avec l’élégance et la finesse d’une plume de paon, et tout de même s’avérer pesant et maladroit comme un éléphant de mer dépressif ?

Sur ce, je vous souhaite de belles lectures,

Lupiot

Lupiot Allez Vous Faire Lire

 

 

 


*Ma « voix dissidente », comme pour The Book Of Ivy. (Parenthèse : Ce très mauvais livre a une suite, qui vient tout juste de sortir, Ivy 2. Fin de la parenthèse désespérée.)

** Ici l’article en question de Christophe Honoré article christophe honoré le monde des livres(seules les premières lignes sont lisibles en mode « gratuit », mais cela permet de se faire une idée assez précise de l’acidité hargneuse du billet intégral). Et…
…ici les réactions que sa diatribe bilieuse a suscitée :
celle de la première concernée, Alice Brière-Haquet, réponse élégante et pondérée, qui se demande (comme tout le monde…) pourquoi tant d’agressivité ;
celle de la géniale Clémentine Beauvais, écrivain pour la jeunesse (et auteur entre autre des Petites Reines, chez Sarbacane) qui dit en gros que Christophe Honoré est un épouvantable hypocrite victime d’un cancer du snobisme et dénué de tout sens de la mesure, doublé d’un sale traître qui tire sur l’ambulance, couché Brutus ;
celle de la non moins géniale Cécile Boulaire, Docteur ès Littérature Jeunesse, qui s’intéresse au tollé déclenché par l’article de Christophe Honoré, et l’analyse comme suit : petit a, apparemment, on n’a pas le droit de critiquer négativement, en littérature jeunesse ?, et petit b, apparemment, par devoir de solidarité, on n’a pas le droit de critiquer les livres pour enfants quand on évolue soi-même dans la littérature jeunesse ? Elle pose, in fine, une question entre les lignes : que vaut la critique en littérature jeunesse, si elle n’est ni libre, ni authentique ?

quelqu'un qu'on aime séverine vidal sarbacane*** [Mon résumé] Quelqu’un qu’on aime, de Séverine Vidal (Sarbacane, 2015), raconte l’histoire d’un groupe de personnes ayant chacun une lutte personnelle à mener, et dont les chemins se croisent à l’aéroport. Les personnages décident d’effectuer tous ensemble le road-trip commémoratif que seuls 2 d’entre eux avaient programmé.
-Il y a Matt, un jeune homme de 20 ans qui vient de découvrir qu’il était papa et doit s’occuper de son bébé, Amber, pendant quelques semaines, car sa mère est occupée.
-Il y a Gary, le papy de Matt, victime d’Alzheimer, qui perd gentiment la boule, et que Matt a décidé d’emmener en voyage sur les traces de son idole, Pat Boone.
-Il y a Antonia, trentenaire qui vient de couper les ponts avec un ex manipulateur et jaloux, et échoue aux entretiens d’embauche à cause de ses tics nerveux.
-Et il y a Luke, un ado qui fuit une situation familiale tendue et pesante à cause de lourds secrets (que l’on devine assez vite).
Cette équipe se soude très vide et devient une véritable famille. Chacun va soutenir les autres, et apprendre ainsi à s’aimer soi, pendant un voyage sur les traces d’une rock-star oubliée, Pat Boone.

les mauvaises notes claire julliard école des loisirs****[Mon résumé] Les mauvaises notes, de Claire Julliard (L’école des Loisirs, 1997, réédition 2015) raconte l’histoire de Frédéric, qui un soir où il en a assez de se faire enguirlander à cause de ses mauvaises notes, fugue. Il traîne à droite, à gauche. Prend le train vers une destination inconnue. Puis, rapidement, se fait intercepter par la police, et c’est là qu’intervient la providence : Frédéric Legendre, 12 ans ressemble à s’y méprendre à Ludovic Bernard, 13 ans, ayant lui aussi fugué 6 mois plus tôt. Et, d’une façon aussi limpide qu’improbable, Frédéric devient Ludovic aux yeux de toute une communauté, à commencer par sa nouvelle famille.

11 réflexions sur “Quand on trouve que c’est bien écrit, mais mal fait

  1. J’ai passé une heure sur ton article à cliquer sur tout les liens, qui en liaient encore d’autres, à m’intéresser à la polémique sur critiquer ou non, en bien en mal, etc. Super intéressant, merci 🙂 De mon côté, pareil que toi, c’est toujours plus fun de recommander une pépite, mais j’aime aussi pouvoir dire que je n’aime pas. On trouve donc des déceptions sur mon blog et j’en croise régulièrement sur les blogs que je suis… Par contre, difficile pour moi d’analyser ce qui ne fonctionne pas dans un roman que je n’ai pas particulièrement aimé. Je n’arrive que très rarement à mettre le doigt sur ce qui ne va pas (le coup du plus que pafait, ça ne m’aurait jamais sauté aux yeux !) et du coup, j’ai l’impression que ma chronique n’a pas de raison d’être car je ne parle que d’un ressenti général négatif sans pouvoir vraiment structurer et analyser ma pensée pour que ce soit constructif… Mais bon ça ne m’empêche pas de le dire quand je n’aime pas ! Et je trouve aussi qu’un avis négatif (pas du gros cassage non plus) est plus intéressant que pas de retour du tout.

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    • Je suis trop contente que tu aies pris plaisir à la lecture et, surtout, que la réflexion ait fonctionné pour toi ! Ce n’est vraiment qu’un élan qui évoque le sujet, pas une dissertation, mais je me suis posée pas mal de questions à la rédaction et je suis très heureuse de ta réaction, du coup 🙂
      Oui, des critiques nuancées sur les blog littéraires, j’en lis également pas mal, et heureusement. Mais on remarque tout de même qu’en jeunesse, il y a une habitude de la critique positive très répandue. Cette habitude est-elle liée à la pratique de l’envoi de SP ? (Peur de dire du mal de l’éditeur ? Mais, dans ce cas, pourquoi plus que dans les autres rayons ?) A la crainte de décridibiliser un rayon déjà peu valorisé par les médias généraux ? (je ne crois pas, du moins pas en majorité) A une bizarre habitude de tous se brosser dans le sens du poil, car c’est un petit milieu ? (Peut-être…) Ou encore, au fait que les blog littéraires en jeunesse soit majoritairement tenus par des adolescent(e)s ?
      Ou un mélange de tout ça ?
      Il y a, j’ai l’impression, souvent une bonne part d’affectif dans les critiques de littérature jeunesse (ce qui, quand on y réfléchit un peu, se comprend facilement), cela peut jouer aussi.

      Je suis bien d’accord, un avis négatif éclairé peut souvent apporter autant, voire plus, qu’un avis positif. Le cassage vicieux doit rester rare, expiatoire et, surtout… humoristique. (Je crois). Et cohérent. (Of course).

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  2. Au début de l’article, tu dis hésiter à poster des chroniques portants un avis négatif sur un roman que tu as lu. Je pense que tu as bien fait de mettre ton article en ligne, tu ne dois pas t’autocensurer : tant que l’article en question est argumenté et raisonné, c’est toujours intéressent, voir même très instructif. (Après se pose la question du « d’accord ou pas d’accord » qui entraine le débat).
    Et puis c’est humain de ne pas tout aimer, si tes arguments sont bons, personne ne te reprochera la critique !

    « 1- Si, alors que le rayon a déjà du mal à se faire sa légitimité, l’on peut dire du mal des gens bien ? » : Tout le monde est sujet aux critiques à mon avis, les auteurs de livres jeunesses comme les auteurs de livres adultes. Ensuite, faut voir si les critiques portées contre l’auteur sont justifiées.
    (Je n’ai pas lu l’article de Christophe Honoré en entier, mais à ce que j’ai compris, il se permet de dire du mal d’Alice Brière-Haquet sous prétexte qu’elle publie beaucoup de livres simultanément : je ne vois pas en quoi la fréquence de publication est un critère qui peut remettre en cause la qualité des œuvres publiées… les livres jeunesses sont souvent assez courts, il n’y a rien d’étonnant à cela donc.)

    « 2- Si un roman peut être écrit avec l’élégance et la finesse d’une plume de paon, et tout de même s’avérer pesant et maladroit comme un éléphant de mer dépressif ? » : Là, je crois ma chère Lupiot, que ça dépend tout simplement des goûts de chacun : ce n’est pas parce qu’un plat est fait avec des ingrédients de qualités que tout le monde va l’adorer.

    Très intéressant l’analyse du Plus-que-parfait pour Quelqu’un qu’on Aime, et le raisonnement Des Mauvaises Notes à propos de l’anachronisme linguistique.
    Dans l’absolu, en ce qui concerne le style d’écriture, j’ai un petit penchant pour le discours direct, et pour les romans qui sont écrits à la 3ème personne. Après, tout dépend du livre bien évidement !

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    • Coucou Cristina ! Thanks (again) pour ton commentaire intéressant et intéressé. Toujours cool de te lire !

      L’article de C. Honoré ne se contentait pas de critiquer la quantité de livres écrits par A. B-H mais aussi la qualité et s’attaquait de façon personnelle et assez virulente à sa conception de la littérature. A ce propose d’ailleurs si tu es curieuse tu peux lire l’article de Clémentine Beauvais qui explore le « paradoxe » dont, d’après elle, souffre Honoré. Une analyse comme une autre qui a au moins le mérite d’être futée et drôle, comme toujours ^^ : http://jeunesse.actualitte.com/humeur/tribune-de-la-charte-parole-d-auteur-clementine-beauvais-1072.htm

      1) si on peut dire du mal des gens biens (particulièrement dans un rayon qui peine déjà à trouver sa légitimité) :
      Ben, je me suis vraiment posée la question, et je me la pose encore, à vrai dire. Pas sur le principe : bien sûr qu’on peut critiquer négativement, si c’est fait avec soin et pas de façon bourin. Mais je me suis demandé s’il était utile / pertinent, en l’occurrence, de dire du mal d’un roman qui, pour beaucoup de lecteurs et critiques (qui ont de bons arguments et ne sont pas aveuglés par des trucs débiles, ce qui était le cas pour IVY, raison pour laquelle je me permettais d’y aller franco) est BON. Est-ce la peine de venir faire pipi dans les flaques, est-ce que ça sert vraiment à quelque chose ?
      Pour ça que j’ai hésité, et que j’ai fini par faire un article non pas uniquement sur ce roman (bien que reposant dessus) mais sur une thématique.
      Bref au final je suis contente ^^ notamment car Séverine Vidal et on éditeur y ont eux-mêmes réagi, et de façon bienveillante.

      2) « c’est pas parce que c’est écrit avec des ingrédients de qualité que tout le monde va adorer » ah ben en fait, c’est super bien, comme formule, ça. T’as pas tort.
      Ce qui n’empêche pas d’analyser les ingrédients pour trouver celui qui gâche le mélange (d’après nous). Un exercice guère évident, mais hyper satisfaisant, quand on trouve.

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      • J’ai jeté un coup d’œil au texte de Clémentine Beauvais.
        L’article m’a mise en colère ; je sais que tout ce que dit C. Beauvais est vrai et je trouve cela révoltant.
        Je suis d’accord avec ce qui est écrit : Que l’opinion générale ne considère pas les lecteurs jeunesses comme de vrais lecteurs parce la littérature jeunesse fait partie d’une classe inférieure. Et surtout, les auteurs jeunesses sont réputés être des sous-écrivains.
        Injuste, snobisme total, propos infondés et discriminatoires !
        Je ne pense pas que la littérature jeunesse est parfaite ou même meilleur que la littérature adulte, elle est juste différente, une différente écriture avec des différents procédés. Cette hiérarchisation générale, et tout ce qui va avec, m’écœure.
        Donc ça me met en colère.

        J’ai dû relire deux fois l’article pour bien saisir les propos de Clémentine Beauvais sur la seconde injonction. J’espère avoir bien compris le sens :
        Au sein de la littérature jeunesse, certaine personnes pensent, dont C. Honoré, que le niveau nécessaire pour les jeunes doit être d’une « qualité artistique optimale » ; donc les livres qui sont commercialisés et standardisés sont jugés comme pas à la hauteur. A cause de cette lourde responsabilité -éduquer les enfants- les auteurs jeunesses ne doivent publier que des livres « parfaits » en tout point.
        Donc, sous prétexte que les livres jeunesses ont la responsabilité de l’Enfance, cette littérature se doit d’être que éducatifs, initiatiques à un « niveau artistique élevé » ; ainsi, la littérature jeunesse divertissante n’est pas de la vraie littérature… = Bullshit
        Perso, je suis pour la diversité : les livres à série, les livres « moins bons », « plus léger », « divertissants » sont tout aussi importants que les livres de « très bonnes qualités ». Et puis, s’il n’y avait pas eu tous ces livres divertissants commerciaux à série, beaucoup de jeunes n’auraient même pas attrapé le goût de la lecture !
        Comme tu l’as remarqué, je mets beaucoup de « guillemets », c’est pour montrer que tout cela est assez relatif.

        Tes reviewers prestigieux, naturellement contre certains de tes propos sur Quelqu’un qu’On Aime, ont répondu avec intelligence et c’était d’autant plus intéressant de lire des avis qui différaient des tiens.

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  3. « Quand on trouve que quand ça dit du mal, ça peut faire du bien quand même »
    Bonjour Lupiot,
    Je suis l’auteure « qui sait écrire nom didiou » mais qui utilise trop le Plus que parfait (je ferai attention, promis ^^). Alors que j’ai eu peur au début (le titre, le côté démonstration en trois points…j’avais le petit pique au bide, le menton qui tremble et le palpitant à 200), finalement, contre toute attente, je n’ai pas du tout détesté votre article. D’abord parce qu’il est plutôt bien écrit le bougre, qu’il est assez drôle et puis parce qu’il analyse en finesse et que ça reste rare. Evidemment, je ne suis pas d’accord avec vous (faut pas déconner non plus, oh), je ne trouve pas que mes personnages soient fades et je crois qu’il ont à se coltiner de sacrés « conflits extérieurs ».
    L’important, pour moi, est de répéter que vous avez le droit de dire ce que vous pensez d’un livre, surtout si vous le faites comme ça, sans assassinat en règle, sans agressivité.
    J’étais très en colère contre Honoré quand il s’est attaqué (c’est le mot) à ma pote Alice, parce qu’il est censé défendre la littérature jeunesse en tant que « directeur du centre de promotion de la LJ » à Montreuil, (quel titre, il doit être fiérot), et qu’au contraire il utilise sa notoriété pour ne parler que de livres qu’il n’aime pas, et surtout de façon si étrangement violente.
    Je ne vais (peut-être) pas encadrer votre chronique au-dessus de mon lit ni la photocopier pour ma mère, mais je la trouve vraiment intéressante (cette histoire de PQP va me tarauder un moment je crois). Je digère moyennement le « complaisant » (sérieux ?), c’est tout.
    Je le dis sans doute aussi parce qu’elle arrive après deux mois un tout petit peu fous, je dois avoir eu près d’une centaine de coups de coeur, il en tombe tous les jours, plus les mots dithyrambiques de Télérama et une réimpression après quelques semaines.
    J’ai des romans qui ont fait des flops terribles et dans ces cas- là, chaque mot négatif prend une importance sur-multipliée, parce qu’il n’y a rien pour compenser.

    Bref, (là il faudrait un gif pour faire passer la longueur du propos), je suivrai votre blog que j’ai été finalement heureuse de découvrir.
    A bientôt,
    Séverine

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    • Bonjour Séverine Vidal,
      Je n’attendais que du bien de Quelqu’un qu’on aime, et j’ai été très séduite par les promesses qu’il faisait au début (la mère d’Amber et le personnage d’Antonia étaient trop cool), c’est pourquoi je projetais déjà une chronique (positive)… et aussi pourquoi vous coller des angoisses au ventre et le palpitant en surmultiplié n’était pas mon intention, malgré ma critique finale. Je suis désolée pour l’émotion que je vous ai envoyée par wifi interposée : veuillez accepter un mug de thé virtuel et un plaid en poil d’alpaga.
      Merci beaucoup pour votre réaction à mon article, drôle et courageuse et qui m’impressionne assez. J’ai été sans doute un peu dure avec votre roman (le « complaisant » et quelques autres terme de vocabulaire, embarqués dans le flot de la critique, sont peut-être légèrement abusifs…), aussi, peut-être, parce qu’il arrive d’être plus sévère avec les oeuvres / auteurs dont on attend beaucoup. (C’est tout à fait le même principe que la constante macabre en scolaire : notre jugement de la qualité est à la hauteur de notre déception).

      L’attitude de C. Honoré relève de choix vraiment bizarres, si ce sont des choix et pas simplement une ligne directe avec ses émotions personnelles. Certes, les articles enragés attirent l’attention sur la littérature jeunesse, mais il y a un gros problème de ton, c’est odieux (et ultra personnel, en plus). Bref, je comprends pourquoi et combien cela a pu faire bouillir, surtout pour les proches d’A. B.-H. Mais cela a déclenché également pas mal de réflexions intéressantes sur la critique en littérature jeunesse.

      Merci pour vos encouragements ! Je ne sais pas si cette histoire de PQP doit vous tarauder, mais c’est intéressant de se pencher dessus à mon avis : honnêtement, certains passages avaient une saveur particulièrement précisément grâce à ce temps, mais c’est son usage trop fréquent qui a contribué, à mon avis, au ressenti distancé, détaché, qui m’a beaucoup gênée.
      Je pense que j’aurai l’occasion de publier cette chronique positive que je programmais initialement pour « Quelqu’un », qui sera plus de la race des prétendantes à l’encadrement mural. En attendant… Bonne écriture !
      🙂
      Julia (Lupiot)

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  4. Bonjour, et merci pour cette chronique bien argumentée et conduite !
    Évidemment, on préfère toujours trouver des critiques élogieuses sur nos « bébés », mais quand il y a un vrai propos, une réflexion, c’est toujours pertinent.
    J’entends votre remarque sur l’aspect peut-être trop « purs » des personnages. Il est vrai qu’on est décidément dans un roman de chaleur, de famille, et que certains motifs plus nuancés auraient pu apparaître au fil du récit…
    Selon moi, la grande force de Séverine, outre sa maîtrise stylistique que vous soulignez, est de nous introduire dans une relation de complicité intense avec les personnages, en quelques scènes ; sans doute apportera-t-elle, de livre en livre, d’autres couleurs à sa palette !
    Pas d’accord du tout en revanche sur votre remarque concernant le plus-que-parfait, qui à mon sens est non seulement affaire de sensibilité (pourquoi est-on plus sensible à tel temps ou mode de narration qu’à tel autre ? cela n’engage que nous ;-)), mais surtout qui trouve dans ce roman-là un véritable sens, à tout point de vue – notamment symbolique, puisque le roman explore en profondeur la thématique du souvenir, questionne la capacité de chaque être humain à retenir, ressusciter, redécouvrir les moments qu’il a vécus et qui – c’est toute la beauté de la chose – le rendent vivant……… Voilà, c’était mon petit contre-argument. Mais encore une fois, je vous remercie pour cette chronique joliment tournée. J’espère bien que le prochain roman de Séverine, qui est vite devenue une des auteures « phares » de mon catalogue, vous séduira pleinement !
    Tibo Bérard, éditeur responsable de la collection Exprim’

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    • Bonjour Tibo Bérard,
      Je suis très honorée de votre intervention ! J’adore la collection Exprim’ que vous dirigez et, si l’on en croit les éloges que font pleuvoir de tous côtés vos auteurs dans votre direction, vous êtes un éditeur ultra impliqué et passionné. C’est un plaisir de lire votre commentaire appréciatif, notamment car le métier d’éditeur est celui que j’aspire à exercer.
      Je suis heureuse de voir que l’on peut comprendre ma critique sur l’aspect trop « bon », « pur » des personnages. Et je suis d’accord sur la « relation de complicité » entre les personnages et le lecteur qui se développe très efficacement en quelques pages : je me suis vite attachée aux premiers personnages rencontrés. Comme je le disais dans ma réponse à Séverine, il y a potentiellement une part de déception de mon côté, d’avoir trouvé les promesses du début non tenues.
      Je maintiens mon ressenti vis-à-vis du plus-que-parfait : il y en a trop à mon avis. Mais je n’avais pas pensé à la résonance symbolique de l’usage de ce temps, et ma foi… ça me fait réfléchir ; ça donne probablement une force à la narration à laquelle je n’ai pas été sensible.
      J’espère également que j’aurai l’occasion de dire (plus de) bien de Séverine Vidal, mais je n’en doute pas tellement. C’est moi qui vous remercie d’avoir répondu (tous les deux) à cette chronique avec tant de sympathie.
      En vous souhaitant de porter plein de beaux « bébés » pour la collection Exprim’
      Julia (Lupiot)

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  5. Encore une réflexion très intéressante sur Allez vous faire lire !
    Dommage que je n’ai pas lu ton article avant de publier ma chronique très critique de Hugo de la nuit de Bertrand Santini ( https://bouquinetatherapie.wordpress.com/2016/05/19/hugo-de-la-nuit-bertrand-santini/ ). J’avais, moi aussi, un peu hésité avant de commencer à écrire sur ce roman que j’ai trouvé « bof » alors que tout promettait une lecture superbe (le thème, l’univers, l’auteur, les autres blogueurs…). Finalement j’ai moi aussi essayé de comprendre pourquoi. Et ça n’a pas été facile.
    Je crains encore d’avoir été trop dure ou injuste. J’espère quand même avoir réussi à nuancer mes propos. *s’en va relire sa bookreview pour la énième fois*
    Si tu as quelques minutes dans ton emploi du temps mouvementé, je serai curieuse d’avoir ton avis sur mon article. 🙂

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