Les Hunger Games, je les ai dévorés. J’ai encore plus aimé leur adaptation cinématographique, ce qui mérite d’être noté puisque ça ne m’était jamais arrivé.
Katniss vit dans le 12e District, région la plus pauvre d’une union futuriste lugubre gouvernée d’une main de fer par le Capitol. Depuis la dernière révolte survenue 74 ans auparavant, le Capitol maintient sa population dans la terreur grâce aux Jeux de la Faim, un divertissement annuel que toute la population est forcée de suivre sur des écrans qui s’allument automatiquement. Les Jeux de la Faim commencent par la Moisson, où deux enfants de 12 à 18 ans sont « récoltés » dans chaque district sur un système de tirage au sort.
Les malheureux élus sont pomponnés pendant le temps de la préparation des Jeux : maquillés, nourris, choyés, chouchoutés par le Capitol qui en fait les coqueluche d’un star-system très malsain. Puis les gosses sont jetés dans une arène naturelle où, non seulement ils sont un danger les uns pour les autres, mais en plus, des pièges technologiques passent leur temps à essayer de les trépasser. Le principe de tout ce système bien rôdé, c’est qu’un seul candidat sera autorisé à sortir vivant des Jeux : ainsi la population vit chaque année dans l’angoisse de se voir ravir ses enfants, et une fois qu’ils sont « récoltés », dans l’espoir intenable et cruel qu’ils en sortent vivants.
Evidemment, Katniss se retrouve dans l’arène, et devient le grain de sable qui enrouera la machine.
Ce qui marche :
- On est constamment collé à la peau de Katniss, de sorte que l’on vit les évènements (notamment ceux des jeux) au goutte à goutte, dans toute leur banale cruauté. Ainsi ce n’est pas si violent, puisque d’une part, la majeure partie du temps, il s’agit de survivre dans un environnement hostile, et d’autre part, les descriptions de scènes de violence sont neutres et efficaces : Collins ne fait pas dans le gore.
- Les personnages secondaires ont une véritable présence, qu’il s’agisse de Prim, Peeta, Rue, Haymitch… Encore que, sur ce point, le film est plus subtil et plus fort (pour le personnage d’Effie par exemple). Le seul qui reste, je crois, plus complexe sur le papier (du moins jusqu’à présent), est Peeta.
- Le triangle amoureux (parce que oui, forcément…) n’est pas neuneu.
- L’écriture est dynamique et personnelle, bien que le style ne soit pas renversant ; la narration est la plupart du temps bien maîtrisée.
Ce qui marche moins :
- On est constamment collé à la peau de Katniss, de sorte que l’on a aucun recul, aucune visibilité sur ce qui se passe dans les autres district, ce qui se dit au gouvernement, et comment le ressentiment et la colère gonflent au sein de la population. Le livre n’a donc pas le souffle libertaire qu’il aurait pu avoir. C’est la raison pour laquelle le film est beaucoup, beaucoup plus efficace sur ce point.
- D’un point de vue strictement narratif, je compte quelques maladresses, mais une assez énorme : l’usage de la première personne. L’auteur fait le pari de ne pas nous dire tout ce que pense Katniss, de nous entretenir dans un certain mystère, ce qui convient à son caractère légèrement misanthrope. Sauf qu’on est à la première personne ! Donc ça coince un peu. Il aurait mieux valu partir sur une narration à la 3e personne, vraiment. Là aussi, évidemment, l’adaptation fonctionne à merveille, puisque le spectateur est nécessairement un oeil extérieur. Du coup, Katniss, dont on apprend très vite à connaître le caractère, peut garder ses secrets…
- L’autre critique narrative concerne le 3e tome et une grosse ellipse malhabile qui nous vole d’un dénouement plus intelligible. Mais rien d’horrible (d’autant que je pense que ce sera corrigé dans les films).
En somme : une très chouette trilogie qui se lit à vitesse grand V et qui a la chance inouïe d’avoir été excellemment adaptée au cinéma.
Si c’est le côté dérangeant des Jeux de la Faim qui vous a plu dans la lecture, allez voir par là.
Et bonne lecture!
Hunger Games, de Suzanne Collins, Pocket Jeunesse, 2009, 399 pages